Santé de la population
Les politiques traditionnelles en matière de soins de santé s'intéressent davantage à la santé des individus qu'à celle de la population (Wolfson, 1994b). Elles mettent l'accent sur les soins directs aux patients malades plutôt que sur les mesures visant la population dans son ensemble. On dit de la deuxième approche qu'elle est axée sur la « santé de la population ».
L'approche axée sur la santé de la population diffère de l'approche traditionnelle des soins médicaux et soins de santé de deux façons. Premièrement, les stratégies d'amélioration de la santé de la population s'intéressent à tous les déterminants de la santé, alors que les méthodes traditionnelles mettent l'accent sur les risques et les facteurs cliniques particuliers aux diverses maladies. Deuxièmement, les stratégies d'amélioration de la santé visent la population dans son ensemble, tandis que les soins de santé traditionnels s'appliquent à une personne à la fois {Comité fédéral-provincial-territorial sur la santé de la population, 1994 39 /id}. Essentiellement, la santé de la population se concentre sur les éléments qui aident à améliorer la santé et le bien-être de la population dans son ensemble. Dans le passé, l'évaluation des risques mettait l'accent sur l'analyse des données biologiques, chimiques et physiques. Plus récemment cependant, la discipline s'est étendue à l'étude de l'effet de différents déterminants sur les niveaux de risque. Par exemple, les niveaux de risque peuvent être évalués en fonction du statut socioéconomique. De plus, l'attention s'est déplacée des stratégies réglementaires et non réglementaires traditionnellement favorisées pour atténuer les risques à des stratégies plus caractéristiques de l'approche axée sur la santé de la population (p. ex. des interventions communautaires). On observe une plus grande prise de conscience de l'impact produit par différents déterminants sur l'efficacité des stratégies d'atténuation des risques, ainsi que les efforts déployés pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies qui tiennent compte de ces impacts. On s'attache davantage à tenir compte des commentaires des intervenants tout au long du processus d'évaluation ou de gestion des risques, comme cela se fait dans le domaine de la promotion de la santé et de la santé de la population. La discussion qui précède fait ressortir le fait que, par contraste avec l'approche traditionnelle, la « gestion des risques » et la « santé de la population » sont intrinsèquement liées. En fait, elles abordent les mêmes questions de différents points de vue. L'intégration des outils et approches employés dans ces deux domaines peut fournir un cadre plus efficace de gestion des questions liées à la santé. En intégrant les domaines de la santé de la population et de l'évaluation et la gestion des risques, les organismes peuvent analyser les risques et y faire face dans une perspective plus large, et ce, de manière cohérente et détaillée. L'intégration d'une approche axée sur la santé de la population à l'évaluation et la gestion des risques renforce le potentiel de collaboration avec d'autres programmes (c.-à-d. les soins de santé, la promotion de la santé et la politique en matière de santé), d'autres administrations et d'autres secteurs. En engageant un plus grand éventail de partenaires dont les objectifs viennent compléter l'évaluation et la gestion des risques, on peut s'attaquer à des problèmes de santé qu'aucun programme, aucune administration ou aucun secteur ne pourrait régler à lui seul. L'adoption d'une approche intégrée permet d'identifier les risques les plus importants du point de vue de la santé de la population, d'évaluer les risques de manière détaillée, d'élaborer et de mettre en œuvre des stratégies efficaces et novatrices de gestion des risques et de répartir les ressources de façon appropriée. Une approche élargie implique également des consultations accrues avec des experts, des membres du public et d'autres groupes d'intervenants, ce qui permettra de tenir compte de leurs commentaires et points de vue utiles dès le début de l'évaluation du processus d'évaluation et de gestion des risques. Risques émergents pour la santé de la population
La vitesse croissante à laquelle les nouveaux produits et nouvelles technologies sont mis en marché soulève des préoccupations concernant l'émergence possible d'autres types de risques pour la santé de la population. Depuis leur introduction sur le marché canadien en 1986, les téléphones cellulaires se sont rapidement multipliés. En 2007, la moitié des Canadiens et Canadiennes possédaient un téléphone cellulaire et le Canada comptait plus de 18 millions d'abonnés. Les dispositifs de communications sans fil de ce genre émettent un champ de radiofréquences qui est faible mais qui pourrait interagir avec des systèmes biologiques. Les préoccupations entourant la possibilité que les téléphones cellulaires fassent augmenter le risque de cancer du cerveau ont abouti au lancement d'une étude cas-témoins épidémiologique multi-pays sur l'utilisation des téléphones portables et le risque de cancer du cerveau, sous la coordination du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC). Le Centre d’évaluation du risque sur la santé de la population est un des deux organismes canadiens participant à cette importante enquête.
Un autre risque émergent pour la santé est la maladie à prion, y compris l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) mieux connue sous le nom de « maladie de la vache folle », qui est une maladie neurodégénérative fatale affectant le système nerveux central du bétail. On croit actuellement que la principale voie de transmission de l'ESB est l'ingestion par le bétail d'aliments contaminés par les produits d'équarrissage provenant d'autres bovins infectés par l'ESB. La majorité des cas d'ESB sont apparus au Royaume-Uni, mais la maladie a également touché d'autres pays en Europe et ailleurs dans le monde, y compris le Canada. L'ESB est une importante question de santé publique parce qu'elle peut être transmise aux humains qui consomment des produits du bétail contaminés. La forme humaine de la maladie, appelée variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vMCJ), est actuellement impossible à traiter. D'importantes stratégies ont été mises en œuvre pour gérer les risques d'ESB, dont l'interdiction des protéines animales dans l'alimentation des ruminants et l'élimination des matières à risque spécifiées (MRS) dont on sait qu'elles présentent un risque élevé d'ESB.
Les risques émergents pour la santé de la population ne sont pas tous de nature principalement environnementale. Les actes terroristes remontent au premier siècle mais, particulièrement depuis le début du XXe siècle et sous l'impulsion des progrès technologiques et scientifiques, ces actes sont devenus de plus en plus fréquents et de plus en plus dévastateurs. Le sigle CBRNE correspond à chimique, biologique, radiologique, nucléaire et explosif. N'importe lequel de ces agents peut être utilisé intentionnellement par les terroristes. Outre les dommages physiques aux civils et aux propriétés, les effets psychologiques d'un attentat terroriste peuvent durer plus longtemps que les symptômes physiques et affecter beaucoup plus de gens. Bien qu'un plan d'action intégré bien conçu puisse prévenir ou réduire leurs effets physiques et psychosociaux, les actes terroristes posent néanmoins un nouveau risque pour la santé du grand public.
D'autres risques émergents ou réémergents pour la santé sont, entre autres, la grippe pandémique, les réactions indésirables aux produits pharmaceutiques, les nanoparticules, les aliments génétiquement modifiés (OGM) et les changements climatiques.
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