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Science des risques pour la santé – Études basées sur la population

Le terme « basé sur la population » s'applique traditionnellement à une étude qui cible une « population générale » définie plutôt qu'une population en milieu hospitalier ou de travail. Les études épidémiologiques devant, par convention tacite, être basées sur des populations, la plupart d'entre elles peuvent être librement considérées comme telles.

Le terme « épidémiologie » est issu du grec epi-demos, qui signifie « sur le peuple ». Par définition, un des concepts fondamentaux de l'épidémiologie est celui de population. Or, les définitions des conceptions et concepts qui sous-tendent les études épidémiologiques sont souvent conflictuelles. Les personnes qui lisent la documentation épidémiologique doivent être conscientes du fait que plusieurs termes sont employés de façon idiosyncratique par les épidémiologistes. La section qui suit décrit les conceptions basées sur la population; elle est suivie d'une brève explication du concept de population.

Conceptions basées sur la population
Pour de nombreux épidémiologistes, une célèbre étude basée sur la population est la Framingham Heart Study (Dawber, 1951), qui commence par échantillonner une cohorte de 5 209 hommes habitant la ville de Framingham, au Massachusetts en 1949 puis en assure le suivi au fil des décennies. Ce genre d'étude, appelée étude de cohorte, est (avec l'étude cas-témoin) reconnu comme une des principales approches épidémiologiques de la recherche étiologique. Comme la population à l'étude avait été échantillonnée parmi les résidents d'un lieu défini, les études de ce genre sont souvent considérées comme « basées sur la population ».

Dans le passé, les études épidémiologiques étaient souvent qualifiées par divers descripteurs méthodologiques indiquant les origines de la population source à l'étude. Par exemple, les auteurs des études en milieu hospitalier essaient de recruter des patients, tandis que les responsables des études sectorielles essaient de recruter des travailleurs. Il reste que ces études ne sont pas universellement reconnues comme étant basées sur la population. L'usage courant du terme implique l'échantillonnage d'individus dans une population générale définie par les frontières géopolitiques. Parfois, même les études cas-témoin (une autre conception épidémiologique) ne sont pas considérées comme basées sur la population parce que l'échantillonnage est souvent perçu comme basé sur les résultats. Cette façon de voir les choses n'est toutefois pas compatible avec l'autre usage.

Le terme « basé sur la population » est impropre. On parle en fait d'une étude basée sur une population directement définie (par opposition à indirectement définie). Par exemple, une étude cas-témoin peut commencer par définir une population source puis prélever directement un échantillon dans cette population pour former la série de contrôle. Prenons, par exemple, ce texte concernant une étude cas-témoin réalisée à Montréal (Parent, et al., 2006) :
La présente étude décrit les associations entre les émissions de moteur diesel et à essence et le cancer du poumon, comme en fait foi une étude cas-témoin basée sur la population qui a été réalisée à Montréal entre 1979 et 1985. Les sujets de l'étude étaient 857 hommes atteints du cancer du poumon. Les contrôles comprenaient 533 contrôles de population et 1 349 patients ayant d'autres types de cancers.

En fait, cette étude illustre une explication plus moderne du sens de l'expression « basé sur la population » et de la dépendance tacite des études épidémiologiques à l'égard d'une population. En théorie, l'étude montréalaise fournit deux échantillons équivalents de la population source (résidents de la métropole montréalaise entre 1979 et 1985). Un des deux échantillons, une population directement définie, a été formé (533 contrôles) par échantillonnage des listes électorales de Montréal. Les auteurs assimilent cette série à des contrôles de population. Différentes listes ont été utilisées au cours de l'étude, étant donné l'appartenance dynamique à une population montréalaise fluctuante au fil des ans.

Une autre approche employée dans l'étude montréalaise donnait une définition secondaire de sa population, c'est-à-dire que la population source était définie indirectement par l'identification des cas de cancer du poumon (diagnostics dans les services de pathologie de différents hôpitaux). Le deuxième groupe de contrôle (les 1 349 « contrôles de cancer ») était constitué d'hommes qui avaient d'autres types de cancer et qui étaient traités dans les mêmes hôpitaux. Ainsi, la population source est définie comme étant le bassin démographique des hôpitaux mais, comme l'étude montréalaise se limitait aux résidents de la métropole, les « contrôles de population » de même que les « contrôles de cancer » sont (en théorie) représentatifs de la même population source montréalaise.

Populations
Un des concepts clés en épidémiologie est celui de population. Les diverses conceptions d'étude et théories statistiques définissent différents types de populations pour explorer certains aspects de la fréquence d'occurrence des maladies. En épidémiologie, quand on parle d'une population d'individus, le concept de temps est essentiel. En règle générale, les populations se déclinent en deux types : cohorte (fermé) et dynamique (ouvert). Les cohortes sont des populations statiques définies par un événement. Mentionnons, par exemple, l'admission à une étude après avoir reçu un diagnostic de maladie ou après avoir travaillé pour un employeur particulier. Toute personne admise dans une cohorte y est admise en permanence (même si le suivi temporel est incomplet). Par contraste, les populations dynamiques sont fluctuantes et leur composition change au fil du temps. Les exemples comprennent la résidence dans une ville donnée, l'exposition temporaire à une substance en milieu de travail ou l'utilisation de médicaments d'ordonnance pour une période donnée. L'appartenance à la population est temporaire et seulement tant que les conditions s'appliquent.

Références :
Dawber TR, Meadors GF, Moore FEJ (1951) Epidemiological approaches to heart disease: the Framingham Study. American Journal Public Health 41:279-286
Parent ME, Rousseau MC, Boffetta P, Cohen A, and Siemiatycki J (2006) Exposure to Diesel and Gasoline Engine Emissions and the Risk of Lung Cancer. American Journal of Epidemiology 165: 53-62.

Lectures additionnels :
Miettinen OS. Theoretical Epidemiology: Principles of Occurrence Research in Medicine. Wiley, 1985.
Rothman KJ and Greenland S.  Modern Epidemiology, Second Edition, Lippincott-Raven, 1998.

 


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